Quid du devoir moral envers les abonnés ?

 Il y a tout juste quelques mois, quand j’ai ouvert timidement les portes de la blogo pour parler littérature à l’écrit et en vidéos, je pensais ne jamais avoir à rédiger un tel article, a fortiori si tôt. J’étais pétrie de bonnes intentions et de valeurs : les articles sponsorisés ? Très peu pour moi ! En refusant de chroniquer un livre reçu par un quelconque partenariat, à moins que ce ne soit un ouvrage que je comptais lire de toute façon et à la condition expresse de pouvoir en donner un avis sincère, je pensais éviter tous les écueils qui jalonnent le chemin d’une blogueuse intègre.


Sauf que je n’avais pas pensé à tout. Voyez-vous, j’ai eu l’honneur d’être invitée au festival Nice Fictions en avril dernier, pour plusieurs types d’interventions : j’ai donné une conférence, tourné un reportage sur place et réalisé des interviews d’auteurs. Le tout sans aucune rémunération, précisons-le, et c’était très bien comme ça. J’ai été heureuse de pouvoir aider cette convention que j’adore en donnant de ma personne, j’y ai pris énormément de plaisir et j’ai pu mettre en pratique le principe suprême à l’origine du blog et de la chaîne Youtube : partager autour de sujets qui me passionnent.
Tout s’est déroulé comme je l’avais escompté, à l’exception des interviews d’auteurs. L’organisation du festival a eu la gentillesse de me laisser carte blanche sur la chose. Avec plus d’une quarantaine d’auteurs invités, je ne pouvais évidemment pas interviewer tout le monde en dépit de ma bonne volonté. Ce n’était logistiquement pas possible et, surtout, le but étant de vous faire découvrir des écrivains, il était hors de question de vous balancer 50 interviews à la suite, cela aurait été indigeste et sans grand intérêt. J’ai donc choisi de sélectionner les personnes que j’allais rencontrer. J’ai été mise en contact uniquement avec des auteurs dont j’avais aimé le livre ou que j’avais très envie de lire depuis un moment.

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image pixabay

Une fois sur place, j’ai eu la surprise d’être approchée par des auteurs que je ne connaissais pas, qui s’étonnaient de ne pas avoir été prévenus que des interviews étaient réalisées et qui en réclamaient aussi une. D’abord un peu flattée, je dois l’avouer, j’ai vite compris que certains n’avaient que peu d’intérêt pour ma chaîne et mon travail et ne cherchaient visiblement qu’à faire connaître leur ouvrage par tous les moyens. Si sur le papier cela me dérangeait un peu de présenter des auteurs que je n’avais pas lus, j’ai fini par céder en invoquant une fois encore le principe de partage : si des écrivains venaient à moi, autant accepter de les rencontrer, j’allais peut-être découvrir des perles vers lesquelles je ne me serais pas tournée naturellement. Et heureusement ça a été le cas, notamment avec Nathalie Bellesso que j’ai très hâte de vous présenter et qui a été une de mes plus belles rencontres sur le festival.
Malheureusement, je suis aussi mal tombée et on en vient au point épineux. Pour restituer tout ça, précisons que j’avais préparé toutes mes interviews des semaines à l’avance, avec des questions personnalisées etc. J’ai donc passé mes soirées et une bonne partie de mes deux nuits sur place à lire et me documenter au maximum sur les auteurs imprévus pour qu’ils aient des questions aussi pertinentes que leurs collègues. Je n’ai en revanche pas pu lire leurs ouvrages respectifs, par manque de temps, par fatigue et car je ne prends aucun plaisir à lire dans l’urgence (et qu’à mes yeux le but premier de la lecture reste tout de même le plaisir).
Il s’avère que le roman d’un de ces auteurs, que je suis allé acheter par acquit de conscience, pour connaître l’œuvre que j’allais présenter sur ma chaîne à travers l’interview, ne me plaît pas, mais alors pas du tout. L’histoire me semble bancale, les personnages ne sont pour moi ni attachants, ni crédibles, j’ai un vrai souci avec les choix onomastiques qui témoignent au mieux d’un gros manque d’inspiration au pire d’une petite tendance au copiage et qui ne sont, dans tous les cas, pas cohérents avec le semblant d’univers que l’auteur essaie de mettre en place, et surtout, je n’adhère pas au style d’écriture qui me fait buter toutes les trois lignes. Bon. Je savais que l’écrivain attendait une chronique au sujet de son bouquin et il était impossible pour moi d’en dire du bien. J’aurais pu rédiger un article honnête avec force détails et explications concernant mon désamour pour cette histoire, mais j’avais peur de blesser l’auteur. J’ai alors décidé de ne rien poster, pas de chronique élogieuse, pas d’article incendiaire : un silence neutre pour sauver l’honneur de tout le monde.
Je pensais m’être tirée sans trop de problèmes de cette situation délicate, mais c’était sans compter sur l’auteur

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image pixabay

en question. Par souci de bien faire, j’ai proposé à tous les interviewés d’avoir un droit de regard sur leur vidéo : une fois montée, je leur envoie le lien privé pour qu’ils valident le montage et l’introduction. Notre écrivain est le seul à avoir demandé des modifications. Outre certaines coupes qui enlèvent un peu de spontanéité au propos, mais que je lui concède de bonne grâce, il m’a surtout demandé de laisser les couvertures de ses livres deux fois plus longtemps à l’écran et d’intégrer en fin de vidéo un panneau avec à nouveau ses couvertures et un lien direct vers une plateforme d’achat. Et là, ce fut trop. 

C’est pour ça que je me retrouve à taper un peu nerveusement sur mon clavier pour sortir cet article. Ma chaîne n’est pas un spot publicitaire. Je n’ai pas été rémunérée pour réaliser ces interviews, l’idée était vraiment de faire découvrir des auteurs que j’aime à mes abonnés sans autre contrepartie que le plaisir de discuter et d’échanger avec ces auteurs. Si en regardant la vidéo quelqu’un a envie de se procurer le livre tant mieux, mais ce n’est pas le but premier. Sachant que les couvertures apparaissent sur la miniature et lors de l’interview, et que je mets toujours un lien vers le site de l’éditeur en barre d’info où l’on peut souvent commander les livres.

Je suis à la fois énervée et peinée. Je ne veux pas faire du tort à cet écrivain en démontant son livre ou en indiquant clairement sur la vidéo de son interview que je n’ai pas aimé son texte. Mais je le trouve un peu gonflé dans ses requêtes et cela me donne juste l’impression qu’il est venu vers moi pour avoir un coup de pub et vendre des livres au passage. C’est d’ailleurs le seul à m’avoir demandé combien j’avais d’abonnés (après même pas 5 minutes de conversation).
Je ne sais pas trop quoi faire. Une chose est sûre : si chronique il y a, elle ne sera pas dithyrambique et il n’y aura pas d’espace pub sur sa vidéo. Je resterai honnête et sincère envers vous. Je me sens un devoir moral et éthique envers mes lecteurs et mes abonnés. C’est pour ça que j’hésite à poster la vidéo de l’interview. Quel sens donner à ce geste ? Pourquoi vous proposer l’interview si le roman présenté ne me plaît pas vraiment ?  J’ai besoin de vos avis, abonnés fidèles et lecteurs de passage : que feriez-vous à ma place ? Comment réagir face à cette situation délicate sans blesser l’auteur ? Vous avez déjà été dans pareil cas ?

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