À ceux qu’on laisse sur le côté | Les tribulations d’une éditrice en herbe #1

Aider des aspirants auteurs à réaliser leur rêve en portant leurs textes aux yeux de lecteurs qui ne demandent eux aussi qu’à rêver, voilà une des raisons presque sacrées qui m’ont mise sur la route de l’édition indépendante.

Quand nous avons reçu les premiers textes chez Magic Mirror, je trépignais de joie. Au fil des semaines, les manuscrits ont déferlé et une réalité à laquelle je ne m’étais pas vraiment préparée s’est imposée à moi avec la froideur implacable de l’évidence : la majorité de ces textes allait se voir recalée pour la simple et pragmatique raison que nous ne pouvons pas éditer tout ce que nous recevons. Et avec un calendrier prévisionnel de quatre à cinq parutions pour 2017, la marge est serrée.

J’ai rapidement pris conscience que pour donner vie à certains rêves, nous allions devoir en briser beaucoup d’autres. C’est la triste réalité du métier.

Sur internet, on lit beaucoup de témoignages d’écrivains désabusés face à leur lettre de refus. Je voulais ajouter le mien, celui de la personne derrière cette fameuse lettre. De l’autre côté du miroir.

source pixabay
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Pouvez-vous seulement imaginer à quel point c’est difficile d’être la personne qui dit « non » ? D’être celle qui annonce le rejet d’un texte où l’auteur aura mis toutes ses tripes et tous ses espoirs ? Je suis cette personne. A l’heure où j’écris ces lignes, nous avons refusé 10 textes après 3 mois d’activité. Dix réponses négatives mûrement réfléchies et soupesées afin de fournir aux écrivains une réponse argumentée et justifiée. Mais toute cette réflexion derrière la décision ne la rend pas plus facile à annoncer.

Certains romanciers ne répondent pas, d’autres remercient poliment, d’autres encore engagent la discussion pour chercher à comprendre ce qui ne fonctionne pas dans leur récit. Mais aujourd’hui j’ai reçu une réponse douloureuse à laquelle je ne pensais pas être confrontée : « Grâce à vous, je n’écrirai plus jamais, merci infiniment. »[1]

Ces mots tourbillonnent en moi comme une sentence. Me voilà à briser une passion, à devenir l’antithèse de ce que je voulais être. Pour être honnête, cette réponse m’a horrifiée.

Je n’adopte peut-être pas la bonne posture, je m’implique peut-être trop émotionnellement dans mon travail. Mais ce sont bel et bien la passion brûlante et les émotions intenses qui m’ont portée vers l’édition jusque-là.

On évoque souvent le faible taux de livres publiés face à la masse de manuscrits soumis. Imaginez bien que derrière cette quantité de textes refusés, il y a autant de personnes qui disent « non » et ce n’est pas un rôle évident.

source pixabay
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A ceux qui reçoivent des lettres de refus, à tous ces auteurs laissés de côté, je voudrais dire de ne pas perdre cette flamme qui les anime. Gardez bien en tête que votre texte a été évalué par une poignée de personnes plus ou moins guidées dans leurs choix par leur subjectivité. Que représentent ces quelques personnes face aux milliers de lecteurs potentiels que votre texte n’a pas encore rencontrés et auxquels il peut tout à fait plaire ? Ne perdez pas espoir, continuez de démarcher les maisons d’édition. Armez-vous de courage car en dévoilant vos écrits au monde, vous allez forcément recevoir des retours qui peuvent vous blesser. Surtout, surtout, ne vous formalisez pas face aux critiques négatives. Je sais combien elles peuvent être dures à entendre, mais faites-en une force, servez-vous en pour vous améliorer et si vous ne les jugez pas pertinentes, oubliez-les, tout simplement. Mais n’arrêtez jamais d’écrire car votre texte a été refusé ou critiqué. S’il vous plaît.

 

[1] Après un refus qui se voulait encourageant et qui se basait plutôt sur le fait que le texte n’entrait pas dans notre ligne éditoriale, l’auteur a tenu à consulter les fiches lectures que le comité de lecture avaient remplies concernant son texte. C’est après avoir lu ces comptes rendus ouvertement négatifs mais détenteurs de pistes pour améliorer son texte que l’auteur nous a répondu cela.

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